« La mer est ton miroir ». Elle devrait aussi être notre boussole. C’est le sens du dernier essai de Jean Ollivro, en forme d’inventaire et de plaidoyer. Deux tiers des habitants de la planète vivent à moins de 60 km des côtes. Mais paradoxalement, la mer est pensée comme un merdorado mythifié plutôt que comme un meritoire. Jean Ollivro nous invite à dépasser une représentation trop terrienne de la mer pour explorer les océans dans leurs cinq dimensions : la surface et le dedans bien-sûr, mais aussi l’au-dessus, le plancher et le sous-sol. Un système complexe et vivant qu’il nous appartient d’appréhender sous toutes ses facettes pour bâtir un véritable projet mer. Et c’est précisément une carence de projets structurants que dénonce l’auteur. S’appuyant sur un bilan en demi-teinte, il se livre à une analyse très documentée de l’animation du dit meritoire. Nous voyageons en sa compagnie sur les océans dans toutes les ramifications du développement durable : « la citoyenneté, la gouvernance, l’économie, le sociétal, l’environnement et le territoire ». Sa phrase vigoureuse, émaillée d’images éclairantes, aiguise notre envie de partager son plaisir autant que ses réflexions. Le lecteur progresse de découverte en découverte, sautant d’une allusion littéraire à une innovation scientifique, d’une démonstration économique à un bilan sociologique, au détour d’un rappel historique, d’une considération philosophique ou d’un bref cours de droit maritime international. Hortillonnage, arénicoles, nodules, dessalage, hôtels flottants ou sous-marins, production d’énergie ou d’économie d’énergies, la mer est un « cerveau liquide qui mène à l’intelligence ». A l’image des miroitements océaniques, ce travail polyphonique nous éveille à l’essentiel. La mer, c’est 20% des protéines que nous consommons et 70% de l’oxygène que nous respirons. Il est donc bien question de l’avenir de l’humanité. « L’océan est le placenta »… Cette mer généreusement offerte à tous et qui n’appartient à personne, nous rend solidairement responsables. Rebelle à toute appropriation, son destin exige le consensus. La « mer promise » est d’abord un appel à plus de démocratie. Un appel auquel les Bretons ne sauraient rester insensibles.
De la mer au meritoire
Faut-il aménager les Océans ?
Jean Ollivro
Editions Apogée
180 pages, 19 €