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Dossier 11 : Dynamisons la Basse-Bretagne !
Le dossier 11 de construirelabretagne.bzh s’attelle à L’enjeu de la Basse-Bretagne. Epineux ouvrage, souvent remis sur le métier sans réelle efficacité. Brest, autrefois plus peuplée que Rennes, est aujourd’hui à la remorque. De plus en plus de plateformes logistiques et de centres de décision migrent d’Ouest en Est. Le développement de la Basse-Bretagne est un bon indicateur de la santé de notre territoire. Plus la Basse-Bretagne sera forte, plus la Bretagne sera forte. Non, la pointe bretonne n’est pas excentrée, elle jouit d’une position géostratégique  exceptionnelle. Plusieurs initiatives récentes montrent le chemin : les nouveaux développements du port de Brest, Le portage du projet Atlantis, l’essor de Combiwest, le GIE des chargeurs de la Pointe de Bretagne… La Région, en inspirant et en facilitant ces développements, jouera son rôle d’accélérateur des dynamiques territoriales.

Dossier 11. L’enjeu de la Basse Bretagne

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Située à l’Ouest d’une ligne courant de Paimpol à Sarzeau, la Basse-Bretagne est un espace singulier qui connaît des enjeux renforcés. En effet, depuis les années 1850, on assiste à un déclin relatif de ce territoire au regard de la partie orientale. Des activités y sont moins dynamiques. Les progressions démographiques y sont actuellement moindres. Comment expliquer ces évolutions ? Comment faire surtout en sorte que la Bretagne avance de manière collective et n’oublie pas cette partie occidentale ? Son état de santé et ses performances économiques constituent en effet le véritable baromètre de la situation bretonne, du maintien ou non de ses équilibres économiques et humains. Qu’est-il en train de se passer ? Quelles stratégies pour déclencher un véritable développement régional en associant l’ensemble de nos territoires ?

Diagnostic

En 1851, on compte 454 000 habitants de moins en Basse-Bretagne qu’en Haute-Bretagne. 01-Basse_BretagneAujourd’hui, l’écart dépasse le 1,3 millions d’habitants. Brest était classiquement plus peuplé que Rennes et le Finistère dans son ensemble regroupait plus d’habitants que l’Ille-et-Vilaine et la Loire-Atlantique. Aujourd’hui, il n’y a plus photo. Les métropoles de Nantes et de Rennes l’emportent largement sur Brest. Les populations de Loire-Atlantique et d’Ille-et-Vilaine sont plus nombreuses que celles du « Penn-ar-Bed » qui devancent le Morbihan puis les Côtes d’Armor (qui étaient pourtant le plus peuplé en 1800 !). On assiste aujourd’hui également à des transferts renforcés de bases logistiques voire de sièges d’entreprises à l’Est de la région. Ce sujet a été largement évoqué et comme découvert suite à l’annonce d’Intermarché de fermer les bases de Rostrenen, Mellac et Saint-Gérand pour ne conserver en Basse-Bretagne que Neuillac, et transférer le reste des activités tout à l’Est de l’Ille-et-Vilaine (Erbrée et Argentré-du-Plessis). Toutefois, depuis une dizaine d’années, les scientifiques avaient déjà constaté ces glissements progressifs, comme insensibles, au profit de la Bretagne orientale. Ils avaient prévenu les pouvoirs publics de ces migrations inquiétantes qui risquaient de marginaliser progressivement la Bretagne occidentale. Or, il ne s’est rien passé et la Basse-Bretagne s’éloigne. Une seule annonce positive et récente concerne les aménagements du port de Brest. Toutefois, on a depuis des décennies et encore aujourd’hui privilégié l’Est Breton en oubliant très largement la partie occidentale de la péninsule (l’actuel TGV). Le résultat est sans appel et la Basse-Bretagne s’éloigne. Des écoles commencent à fermer dans le Finistère quand on en ouvre en Ille-et-Vilaine. 02-Bretagne_sateliteLes problèmes de logistique pour les entreprises situées en Basse-Bretagne se posent avec de plus en plus d’acuité. La localisation essentielle des pouvoirs à Rennes et Nantes expliquent sans doute ces déboires. En lien avec le dossier précédent consacré à la mer, ils résultent aussi d’une vision très terrienne de l’aménagement du territoire breton. Rappelons que la marginalisation relative de Brest coïncide avec le déclin des usages maritimes et l’arrivée progressive des chemins de fer. Les réseaux routiers majeurs de sens Est-Ouest ont aussi convergé initialement vers Rennes avant de créer des liaisons nord-sud qui sont plus rares. L’organisation méridienne du trafic ferroviaire breton est pour le moins déplorable (la ligne Rennes-Redon-Nantes est pour le moins déficiente, il faut actuellement 1h20 pour parcourir les 73 km séparant Brest de Quimper !). On a aménagé essentiellement l’Est en oubliant l’Ouest, les liens Est-Ouest en oubliant la mer. De fait, les entreprises veulent se rapprocher du … « centre ». Quoi de plus logique ? Cette évolution incontestable est donc un grand problème breton même s’il ne faut pas exagérer les difficultés basses-bretonnes. En effet, toute la Bretagne est aujourd’hui attractive et gagne environ 25 000 habitants par an. Cela dit, l’écart se renforce et les édiles politiques négligent cet enjeu crucial. Ainsi, Rennes (classiquement Condate, le confluent) ou Nantes ont beaucoup à perdre si elles se retrouvent demain à la tête d’une forme de Connemara. L’enjeu de la Basse-Bretagne est l’enjeu de toute la Bretagne. N’oublions pas que Nantes a connu un essor très conséquent lorsqu’elle a animé, suite à l’invention de Nicolas Appert, tout un front d’industrialisation et de conserveries qui courait jusqu’à Douarnenez. Que Rennes a toujours bénéficié d’une prospérité quand elle était française et bretonne. Si ces villes se trouvent à la tête d’un espace délaissé et moins actif, elles ne seront que des terminus et vont tout simplement s’affaisser. La Région doit ici rattraper les égoïsmes métropolitains actuels et parfois consternants, imposer un nouveau souffle au bénéfice de tous.

Quel programme ?

Au bénéfice de toute la Bretagne, l’enjeu du rééquilibrage breton doit devenir un enjeu prioritaire avec au moins cinq actions combinées qui entrent parfois en résonance avec des dossiers précédents (le dossier 1 sur l’unité bretonne, le dossier 3 sur les enjeux de l’organisation territoriale, le dossier 10 sur la Bretagne et la mer, etc). Le développement du pays impose aujourd’hui une vision stratégique et systémique parfois éloignée de certains choix actuels.

  1. Tout d’abord, les liens avec Nantes-Saint-Nazaire sont totalement cruciaux pour résoudre ce déséquilibre territorial grandissant. La Basse-Bretagne est orpheline sans la mer et il est aujourd’hui totalement illusoire d’apparaître sur la scène planétaire si l’on ne dispose pas d’un réel hub portuaire et logistique. Nantes aide donc naturellement Brest, tout comme Brest, par exemple avec ses activités de recherche, aide au développement de Nantes ou de Saint-Nazaire. Une valorisation maritime bretonne courant de Saint-Malo à Pornic doit donc compléter des options d’aménagements opérés pour lors essentiellement au profit de la capitale d’une Bretagne administrée. L’avenir de la Bretagne s’écrira par une ambition calée sur une réalité péninsulaire (tourisme, flux économique, animation du cabotage, industries et activités marines…) et non sur la présence d’un découpage inadapté qui nie la réalité fonctionnelle du pays et en contre les intérêts.
  2. Au plan logistique, la Région poursuivra voire renforcera ses investissements en cours pour le port de Brest (220 millions d’Euros d’ici 2020). Cette action est positive, tout comme à partir de Brest le portage récent (juillet 2015) du projet Atlantis de services d’autoroutes maritimes sur l’Arc Atlantique. 03-Bretagne_portLe projet régional de Brest illustre sans doute une prise de conscience récente, même si cet investissement est à relativiser au regard du coût global de la LGV (3,2 milliards) ou de l’opération « Le Havre 2000 » (1,4 milliard), il est vrai port de Paris. A Brest, l’opération va dans un premier temps et d’ici 2018 consolider un polder et permettre un accès renforcé. Il est ensuite prévu que cet espace accueille des activités industrielles nécessaires à la production des énergies marines (montage et construction). Globalement, la Région fera tout pour diminuer le niveau prohibitif des taxes portuaires et réfléchira à l’installation d’éventuelles zones franches. Des partenariats internationaux seront noués en communiquant sur l’exceptionnelle situation logistique et en arrêtant de se définir comme « excentré ». La Bretagne est près de la deuxième route maritime mondiale. Il faudra s’inspirer des choix logistiques réalisés dans certains détroits et même en Irlande pour établir enfin un vrai plan stratégique breton.
  3. En effet, le lien terre-mer est crucial et l’on sait les difficultés à établir une véritable stratégie fret au départ de la Basse-Bretagne. Toutefois, preuves à l’appui, Combiwest démontre, malgré toutes les difficultés, que cette organisation peut être bénéfique pour la conquête de marchés lointains (extension actuelle vers l’Italie, plus largement vers la dorsale européenne qui concentre de nombreux marchés). Mais on est bien loin d’avoir en Bretagne des stratégies logistiques intégrées. 04-Combiwest_Bretagne_transportsA l’instar de la Loi Macron pour les cars (que plus personne ne regrette), il faudra bien un jour ou l’autre s’attaquer en France aux archaïsmes du fret ferroviaire qui pénalisent plus que toute autre région la Bretagne. N’oublions pas qu’un des éléments du succès d’Algésiras, devenu premier port de Méditerranée en volume (le trafic de port initialement très modeste et créé pour l’essentiel en 1965 vient de dépasser Marseille !) est lié à de bons choix stratégiques (un hub de transbordement et d’échanges pour les conteneurs). Mais il réside aussi dans la création de transports intégrés et par exemple du terminal ferro-portuaire du Muelle de Isla Verde Exterior, financé à hauteur de 16 millions par les Asiatiques et notamment le Coréen Hanjin. Aujourd’hui, au-delà des distances et de l’existence ou non d’un hinterland, c’est l’excellence des « supply chain » et liens entre les différents modes de transport qui fait la différence. L’enjeu est donc mondial en valorisant les grandes lignes maritimes qui partent déjà de l’estuaire de la Loire, de Brest (exportation de volaille par exemple) et de Lorient. Mais il est aussi continental, national et régional avec l’impérieuse nécessité de créer des systèmes de transports rapides et combinés (cabotage, ferroutage etc.). Sans oublier bien sûr le transport routier qui conserve un rôle essentiel et sur lequel les Bretons tentent aussi de s’organiser (le GIE Chargeurs Pointe de Bretagne par exemple). Aujourd’hui, cette solution globale et offre systémique est très largement défaillante. Tant qu’elle ne sera pas réfléchie de manière complète, la Bretagne restera ce quai contourné et la Basse-Bretagne poursuivra sa marginalisation.
  4. Dès que la Région en aura la possibilité, elle établira ou implantera de manière prioritaire les équipements et centres de décision à l’Ouest de la Bretagne. Elle le réalise déjà pour quelques réalisations symboliques 05-Port de Lorient(le siège du .bzh est à Quimper par exemple) et a obtenu la décentralisation du siège de l’Ifremer. Toutefois, rien n’empêche la Région de déconcentrer certains de ses services dans le Finistère et plus largement dans la partie occidentale. Une politique plus volontariste orientera des aménagements vers la Basse-Bretagne en évitant de les grouper uniquement sur la métropole brestoise. Les nouvelles technologies (visioconférence, télétravail…) permettent sans difficulté la présence de ces organisations plurielles, partagées et plus proches du terrain. Ces réalisations renforceront la cohésion régionale en limitant le sentiment « d’oubli » ou « d’abandon » parfois exprimé en Basse-Bretagne. Des sessions du Conseil régional et divers événements pourront redécouvrir une forme d’itinérance qui existait jadis. La Région dispose surtout de multiples biais et réseaux d’influences lui permettant de peser sur des décisions d’implantations afin de prémunir un risque de dislocation.
  5. Ainsi et enfin, les réseaux et de solidarités entre Haute et Basse Bretagne seront renforcés. Le poids de cette limite d’origine essentiellement linguistique est parfois exagéré avec des propos frisant le ridicule (« Rennes, dernière station de métro avant Paris », la présence de quelques Rennais ou Nantais faisant preuve en retour de condescendance pour la partie occidentale…). Il faut en arrêter avec ces divisions car les Bretons ne gagneront que groupés. La Conférence des Villes de Bretagne sera relancée pour que les villes de toutes tailles se parlent, se connaissent davantage, s’associent au lieu de se diviser. Un axe de villes charnières (Saint-Brieuc, Loudéac, Pontivy, Vannes, Guérande…) renforcera les interactions entre les parties occidentales et orientales de la région. On tentera surtout  de muscler les activités d’ensemble du Centre-Bretagne car l’opposition argoat-armor est aussi vive et l’emporte même parfois sur les déséquilibres Est-Ouest. Un axe majeur ici sera de valoriser ce territoire parfois oublié alors qu’il est au milieu des autres. Le secteur de Loudéac-Pontivy par exemple, est au maximum à 1h-1h30 d’un bassin de consommation de 4,5 millions d’habitants et du coup des entreprises de logistiques s’y sont spontanément implantées. Une offre touristique de rayonnement pourrait aussi y être déployée. Mais ce « cœur de Bretagne » est souvent délaissé. On pourrait y implanter des bases névralgiques utiles à l’ensemble des activités bretonnes. Par exemple, en raison d’une présence supérieure dans ce secteur de l’agriculture biologique, on peut penser à la création d’un centre mutualisant l’activité et les transports des agriculteurs pour les aider à desservir des marchés urbains essentiellement littoraux et déficitaires sur ces productions.

Au final, il existe on le voit nombre de solutions pour résoudre un déséquilibre qui s’aggrave. Plus la Basse-Bretagne sera forte, plus la Bretagne sera forte. Ce point capital doit être entendu par l’ensemble des décideurs, notamment ceux plus nombreux localisés pour des raisons historiques et de géographie des pouvoirs à l’Est de la région. La marginalisation relative de la Basse-Bretagne n’est pas une fatalité mais résulte de choix hérités qui portent une responsabilité sur la situation actuelle. Mais cette évolution peut être rapidement infléchie par un volontarisme politique. Le prochain Conseil régional doit être un accélérateur des dynamiques territoriales.

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